Le capitalisme est mort, vive l’économie du partage ! - Jeremy Rifkin

À l’occasion de l’USI 2018, l’économiste chantre de la 3e révolution industrielle, Jeremy Rifkin, a exposé les raisons pour lesquelles la 2e révolution industrielle était arrivée à son terme. À ses yeux, non seulement la 3e révolution industrielle est en cours, mais en plus il faut l’accélérer pour espérer lutter efficacement contre le changement climatique et finalement créer un nouveau modèle de civilisation plus écologique et transversal.

« Nous vivons clairement la fin d’une ère industrielle ». C’est ainsi que l’économiste et essayiste de renom Jeremy Rifkin a ouvert sa conférence USI 2018. Aussi le PIB connaît-il un ralentissement global. Aussi la productivité est-elle en diminution depuis plus de 20 ans. Aussi le chômage de masse s’installe-t-il pour toucher, notamment, les populations les plus jeunes. Aussi 50 % de l’humanité ne se porte-t-elle pas mieux que ses ancêtres.

Un bilan peu enthousiaste. Et encore. Jeremy Rifkin n’avait alors pas encore abordé la question d’une crise bien plus grande, « existentielle même » : le réchauffement climatique et la possible disparition dans les 50 années à venir de 50 % des espèces que compte encore notre planète ! « Tout s’effondre en temps réel. Mais, malgré quelques programmes pilotes, nous restons endormis. Il faut nous réveiller. Nous avons besoin d’une nouvelle vision économique. Et elle doit être déployée rapidement dans les pays développés comme dans les pays en développement. Nous devons agir pour garder l’espoir d’éviter la catastrophe », a assuré Jeremy Rifkin.

Une civilisation =  3 technologies
Un cri d’alarme certes. Mais pas un cri de détresse. Car il est encore possible à ses yeux de changer la donner. Et la 3e révolution industrielle nous offre à tous la possibilité de le faire, a-t-il poursuivi. En s’appuyant sur les nouvelles technologies qu’elle offre en matière de communication, d’énergie et de transports. Les 3 composantes technologiques qui selon lui déterminent une révolution et dessinent les civilisations. Ainsi, la première révolution industrielle, née au Royaume-Uni, s’est déployée grâce au charbon, au télégraphe et aux machines à vapeur. La deuxième révolution industrielle, née aux Etats-Unis, s’est construite sur le pétrole, le téléphone et la télévision, et sur les motorisations thermiques. Et la 3e révolution industrielle s’appuie désormais sur les énergies renouvelables et décentralisées, l’Internet, et la mobilité électrique et partagée.

« Quand j’ai rencontré la chancelière Angela Merkel la première fois, elle m’a demandé comment créer de la croissance et de l’emploi ? Une question à laquelle j’ai répondu par une autre question : comment faire cela quand toute votre économie, votre infrastructure et votre vie sociale continue d’être guidée par des outils et règles propres à la 2e révolution industrielle ? Nous avons donc continué notre conversation autour de la 3e Révolution industrielle. Un changement que nous connaissons déjà : c’est la révolution numérique. Poussée et accélérée, cette dernière peut réellement nous amener à changer de paradigme dans l’économie comme dans la société », a raconté l’économiste très écouté des décideurs européens. Et d’ajouter : « Nous avons connecté l’humanité et nous allons pouvoir démocratiser et valoriser la diversité de nos sociétés. Et ce à un coût presque marginal. »

Le coût marginal zéro ou l’avènement de l’ère collaborative
Selon lui, tous les coûts tendent vers zéro. « Qui peut donner un prix au soleil ou au vent ? ». Quant aux installations, leur prix n’a de cesse de décroitre. Autre exemple, la communication et l’intensité du pouvoir de calcul mis entre les mains de tous. « La Chine produit désormais un smartphone pour 25 dollars qui dispose d’un pouvoir de calcul très supérieur à celui de l’ordinateur dont disposaient les scientifiques de la Nasa quand ils ont envoyé des hommes sur la Lune ! », a rappelé Jeremy Rifkin. Et côté mobilité, la génération des millenials ne rêve pas de posséder une voiture mais de pouvoir la partager ou en disposer lorsqu’elle est lui est utile. 
« On change clairement de modèle : du consumérisme vers la durabilité, du produit au service, de la possession à l’usage…La 2e révolution industrielle était centralisée, possédée et fermée. Tout était verticalisé pour réaliser des économies d’échelle. Mais cette 3e révolution industrielle est de nature distribuée. Et elle fonctionne d’autant mieux si plus de personnes y ont accès et si elle est transversale », s’est réjoui l’économiste. Reste cependant à nous mobiliser collectivement pour driver les investissements dans le bon sens. Jeremy Rifkin a ainsi invité les entreprises et Etats à cesser toute mobilisation financière au profit de systèmes hérités de la 2e révolution industrielle. Il a aussi pointé du doigt les failles que la 3e révolution industrielle porte, à savoir, surtout, les risques de cybercriminalité.
Et pour conclure une intervention USI mêlée de craintes et d’invectives, l’économiste américain a motivé son relatif enthousiasme : « si les technologies sont clairement des clés dans ce nouveau modèle, je ne crois pas qu’elles soient notre avenir. Tout dépendra surtout de la manière dont les êtres humains choisissent de les utiliser. Mais la nouvelle génération des millenials me donne des raisons d’être optimiste. Si pour l’ancienne génération, la liberté c’était l’indépendance, la possession, l’exclusivité même, pour les millenials, la liberté c’est l’inclusivité. C’est une génération qui a grandi dans l’ère du partage. Et pour elle si le réseau gagne, chaque individu gagne ».

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