conférence USI 2017, traduit le message qu’il veut nous transmettre : il est l’heure de se mettre en mouvement !
Pour le directeur de Pentacle (The Virtual Business School), notre plus grand obstacle est dans notre incapacité à sortir la tête du 20e siècle. A commencer par notre façon d’imaginer nos stratégies d’entreprise, et nos les relations humaines ; toutes fondées sur l’efficacité. Sans renier les défis que l’automatisation nous réserve, Obeng persiste à voir l’Homme comme le héros inconditionnel de l’histoire numérique. A condition qu’il parvienne à changer son schéma mental. Son leader à lui est un centaure : créature profondément humaine, qui aura su intégrer le potentiel des technologies à son processus de réflexion.
Mais comment se mettre justement dans cet état d’esprit nouveau ?
Il faudrait commencer par comprendre comment nous pensons. Et là-dessus, Luc de Brabandère nous propose un éclairage. Notre pensée s’articule autour de deux mouvements : l’induction – basée sur les simplifications que nous faisons du monde, et sur lesquelles nous formons des théories, des stratégies, des hypothèses. Et la déduction –processus plus mécanique, qui vise à réaliser ces hypothèses selon certains schémas établis. Si la déduction peut être confiée dans une certaine mesure aux machines, l’induction relève purement de nos facultés humaines.
Le fameux centaure dont parlait Obeng, aura justement la faculté de changer ses simplifications et modéliser ses stratégies selon des principes nouveaux. C’est le fondement même de la créativité : voir autrement. On peut illustrer cela avec les parcours de l’entreprise Phillips, aujourd’hui acteur majeur de la santé et hier producteur d'électroménager. En regardant autrement son coeur de métier et en y appliquant des hypothèses inédites, Phillips s’est ouvert à un nouveau marché – sans perdre pour autant son savoir-faire.
De la même manière, notre créativité est sans doute notre meilleure arme pour sortir des réflexes du 20e siècle, comme le réclame Obeng.
A lire : Comment être créatif dans un monde numérique ?
Outre la créativité, c’est par une bonne connaissance du terrain que le leader devient centaure. Encore très silotées, les expertises métiers et techniques tardent à se nourrir les unes des autres. Le leader de demain, lui, sera transversal.
Scientifique numéricienne et prosélyte du code, Aurélie Jean milite précisément pour la généralisation de l’apprentissage du code auprès des leaders et dirigeants. Et pour cause : le code est partout. Dans chaque produit, chaque idée, chaque innovation. Pour acquérir une légitimité, découvrir le champ de possibilités, être techniquement au fait, le leader est tenu de comprendre “les tenants et les aboutissants de cet écosystème”. De cet esprit éclairé et critique peut alors naître une vision innovante.
A lire : Aurélie Jean- Plaidoyer pour le code
S'intéresser à cette technologie, c’est aussi prendre en compte à quel point elle a bouleversé les usages. Auprès des clients, des consommateurs, mais aussi au sein de l’entreprise. Alors que la technique gagne du terrain, l’expérience – et les usages qu’elle implique – devient un point d’autant plus différenciant.
Pour John Maeda, tout se concentre dans le design ; la façon dont il facilite notre rapport à la technologie, fluidifie nos expériences et réduit nos points de douleur. Et ce, partout où nous évoluons. Le leader doit être capable d’anticiper l’expérience des clients, mais aussi de designer celle des salariés. Cela passera-t-il par plus de transparence ? Des rendez-vous quotidiens entre équipes ? Une plus grande liberté dans les prises de décisions ? Comment réveiller l’humanité des équipes – valeur clé du leadership pour Maeda ?
A chaque leader de sonder sa communauté et d’en tirer les apprentissages nécessaires pour la faire grandir, rayonner... et évidemment la rallier à sa cause.
Car au fond, qu’est-ce qu’un leader sans la collectivité qui l’entoure ?
Pour Sartre, l’expérience de la honte illustre la façon dont le regard d’autrui agit sur notre perception de nous-même. J’ai honte car le regard d’autrui me renvoie mon ridicule, ma vulgarité, ma faille… On pourrait attribuer cette situation réflective à bien des contextes ; la fierté, la confiance, l’assurance, etc. Les synergies du collectif peuvent être porteuses d’autant d'allégresse que de désarroi. Le leader, par sa mise en avant, se positionne précisément au coeur de l’arène. Le risque est inhérent à la posture. Comment endosser ce rôle de leader auprès de la communauté ?
Sa crédibilité – nous l’avons vu – commence par sa bonne connaissance des sujets qu’il manipule : savoir technique, vision du marché, regard critique. Sa légitimité, elle, est encore à asseoir.
Leader à la Patrouille de France, Virginie Guyot connaît bien le risque, il fait partie de son quotidien. Pour la pilote de chasse, c’est la dynamique collective, l’objectif commun qui, pendant les moments de doute ou de démotivation, sert de “carburant”.
Pour guider son équipe vers cet état d’esprit, un bon leader peut s’appuyer sur plusieurs éléments tangibles :
« Sur une vingtaine de candidats, il y en a toujours qui sortent du lot d’un point de vue professionnel mais ce ne sont bien souvent pas ceux que nous sélectionnons car ce qui fait la différence, ce sont les qualités humaines telles que l’intelligence émotionnelle, la capacité à se remettre en cause ou la volonté de jouer collectif. C’est un peu l’exemple d’Aimé Jacquet ne sélectionnant pas Eric Cantonna en 1996 : ‘tu es le meilleur de l’équipe mais l’équipe est meilleure sans toi’ ». Virginie Guyot.
Cette dynamique collective agit alors comme un cercle vertueux. La valorisation et la confiance de chaque membre du groupe agit sur la qualité du projet et nourrit le leader d’une dynamique qu’il transfère à nouveau au groupe.
A lire : Virginie Guyot - Etre leader à la patrouille de France
Mais qui dit leader dit forcément manager ou dirigeant ? Même si cela pouvait sembler acquis à travers les précédentes lignes, ce n’est pas le cas. Chacun des enjeux évoqués est d’ailleurs applicable à toute personne qui “prendrait le lead” sur un projet, une initiative, etc.
Pour Alexis Nicolas, speaker USI 2014, le leadership est avant tout une posture, et non une position : “c’est quelqu’un qui en a marre du statu-quo et décide de prendre une initiative, à un moment donné, sur un ou plusieurs projets en particulier.”
A lire : Interview d’Alexis Nicolas : “Le management de demain ressemblera aux communautés Internet”
Partant de ce postulat, le leadership un statut éphémère qui participe à l’humilité de la personne qui le porte, et plus largement à la décentralisation du pouvoir. C’est une responsabilité individuelle forte, autant qu’une passation de pouvoir. C’est un héritage à construire et transmettre.
Etre leader, c’est faire en sorte que les autres le deviennent.
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