Nicolas Demassieux - L’aube de l’Internet ambiant
Un peu plus de 40 ans après la naissance d’Internet, Nicolas Demassieux se penche sur l’évolution de cet outil désormais intrinsèquement lié à notre société. Au cours d’un talk qui dresse le portrait d’un réseau ultra-connecté, il énonce l’évolution de nos usages numériques.
Plus qu’un simple outil de partage d’informations, Internet s’impose au fur et à mesure du perfectionnement de nos systèmes de transmissions, non plus comme un espace parallèle, mais comme une entité fusionnant avec notre environnement naturel. Une hybridation annoncée entre Internet et notre planète qui va de pair avec notre besoin permanent d’innover et d’améliorer nos technologies.
Une progression exponentielle
En 2010, 1,2 milliard d’ordinateurs connectés à Internet étaient recensés. Aujourd’hui c’est plus de 5 milliards. Une augmentation significative du nombre d’êtres connectés qui préfigure une course à la performance grandissante.
1 million de kilomètres de câbles sous-marins déployés, 12 millions de bases mobiles à travers le monde… les chiffres donnent le tournis. Internet étend ses ramifications sur la surface du globe et jusque sur notre propre corps grâce, par exemple, aux montres connectées. Se raccorder n’importe où, n’importe quand et de plus en plus vite, voici les enjeux prioritaires des prochaines années. La preuve avec la courbe de production en constante augmentation de processeurs. 1,2 milliard de ces puces hyper développées, ces « bêtes de courses » comme les qualifie Nicolas Demassieux, ont été répandues sur le marché l’an dernier. Des calculateurs de génies qui se retrouvent dans nos poches et au cœur de l’activité des data centers et autre clouds.
Selon le Vice-président de la recherche du Lab d’Orange, le bouleversement le plus tangible est pourtant à observer du côté des microcontrôleurs. De minuscules circuits intégrés présents partout, de nos télécommandes aux rétroprojecteurs en passant par les drones, 25 milliards ont été fabriqués en 2015. Et ce sont ces microcontrôleurs qui devraient changer la manière d’interagir entre Internet et la planète. Car si leur activité est pour le moment individualisée, sans connexion aucune avec le reste du réseau, une fois raccordés entre eux et au système-mère qu’est Internet, ces circuits contribueront à modifier le visage de la transmission d’informations.
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L’Internet ambiant
« Nous allons passer d’un Internet centré sur de l’information symbolique à un Internet incorporé dans notre monde » assure Nicolas Demassieux.
Une révolution débutée avec la déferlante des objets connectés. Un exemple avec l’extincteur qui pourrait bientôt passer d’un simple outil d’urgence à un véritable média d’assistance en cas de crise. Autonome et connecté, l’extincteur saura évaluer sa pression intérieure et donc détecter s’il est utilisé. Il pourra alors envoyer des notifications aux pompiers qui en retour interagiront avec nous pour nous guider sur son juste usage et sur les dispositions à prendre. Nous ré-imaginons notre façon d’appréhender le monde et « transformons la nature de notre relation avec l’espace digital ».
Aujourd’hui nous accédons au monde numérique à travers une interface solide comme un ordinateur ou un smartphone, mais demain, les dispositifs de réalité augmentée se démocratiseront et favoriseront une hybridation entre le monde physique et le monde virtuel. L’Internet of Things (IoT) et son flux constant de données permettront aux utilisateurs de se coordonner à cet Internet ambiant, environnant, à travers leurs différents devices. Chacune de nos actions enrichira le monde qui nous entoure dans une contribution continuelle entre humains et outils digitaux.
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Une planète augmentée
Cette interaction simple et implicite avec notre environnement connecté va peu à peu permettre un réaménagement de notre planète. À l’aide de capteurs et microprocesseurs, la connexion entre la Terre et nos systèmes de transmission et d’information deviendra de plus en plus symbiotique pour « passer d’une connaissance théorique limitée du monde physique à un Internet doté de sens, de muscles et on l’espère, de cœur » déclare Nicolas Demassieux. Après la théorie de l’homme augmenté, celle la planète augmentée ? Il semblerait.
Évoquant le mathématicien Claude Shannon qui théorisa le processus de communication entre un transmetteur et un récepteur, Nicolas Demassieux insiste sur l’importance vitale de la circulation de l’information. Notre éco-système lui-même repose sur cet échange. De la migration des espèces aux courants marins en passant par le parcours d’un pollen porté par le vent, notre environnement naturel a toujours su, d’une manière ou d’une autre, faire voyager les informations nécessaires à sa préservation.
« La Terre est, depuis toujours, un gigantesque calculateur biologique. L’ensemble de cette machine vivante calcule et communique avec une puissance supérieure à n’importe lequel de nos processeurs » conclut Nicolas Demassieux, qui imagine un Internet s’inspirant de l’accélération de la communication biologique pour des performances toujours croissantes.
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